lundi 17 janvier 2011

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Les lingots d'or à Leïla Trabelsi, 5 milliards de dollars à Ben Ali : Main basse sur la Tunisie

Le « casse » de Leïla Ben Ali, l’épouse de l’ex-président tunisien, qui aurait dérobé d’une banque tunisienne 1,500 tonne d’or avant de s’enfuir à l’étranger, continue de provoquer un tollé. Révélée par DNA dès vendredi 14 janvier, puis reprise dimanche soir par TF1 ainsi que par le quotidien Le Monde, l’information, non confirmée officiellement, jette une lumière crue sur le régime « kleptomane » instauré par Ben Ali, sa femme, et des deux familles, les Ben Ali et les Trabelsi, qui ont régné en Tunisie durant plus de vingt ans. Les deux clans ont, selon divers témoignages, véritablement pillé le pays.

Le Journal Le Monde (édition du 17 janvier) indique que l’Elysée, se basant sur des recoupements des services secrets français, suppose que l’ex-première dame de Tunisie a pris la clé des champs en emportant 1,500 tonne d’or. Selon le quotidien du soir, Leïla Ben Ali, née Trabelsi, se serait rendue à la Banque centrale de Tunisie chercher des lingots d'or.
Le gouverneur, écrit encore le Monde, aurait refusé et demandé un ordre écrit. Mme Ben Ali aurait alors appelé son mari, qui aurait d'abord lui aussi refusé, puis cédé. « Il semblerait que la femme de Ben Ali soit partie avec de l'or », explique un responsable politique français au Monde. « 1,5 tonne d'or, cela fait 45 millions d'euros », poursuit-il.
L’information serait parvenue à l’Elysée via une « source tunisienne, en particulier de la Banque centrale. Cela a l'air relativement confirmé. »
Mais voila ! La banque centrale de Tunisie apporte un démenti à l’information. « Je n'ai reçu aucun ordre verbal ni écrit de sortir de l'or monétaire. Notre stock d'or n'a pas bougé », assure au Monde Maaledj Habib, directeur général de la caisse générale, des comptoirs et des systèmes de paiements.
Explication d’un responsable haut placé des services secrets français : la scène aurait eu lieu non pas vendredi 14 janvier, date de la chute du régime, mais à la fin de l'année 2010. « La demande à la banque de Leïla Ben Ali aurait eu lieu en décembre. Mme Ben Ali a quitté la Tunisie une première fois en décembre. L'or se trouverait aujourd'hui en Suisse », explique cette source française.
Dès vendredi 14 janvier, DNA a révélé que Leïla Ben Ali a extrait 1500 lingots d’or de la Banque centrale tunisienne avant de s’envoler à Dubaï, puis de revenir à Tunis.
Le couple présidentiel y est resté jusqu’au vendredi 14 janvier, jour de la chute et de la fuite. Leïla Ben Ali aurait ainsi rejoint une nouvelle fois Dubaï où elle possède des biens et des commerces. L’ex-président, lui, s’est envolé à 17h30 de Tunis à bord d’un hélicoptère vers Malte où l’attendait l’avion de son ami, le prince Nayef Ibn Abdelaziz, ministre de l’Intérieur du royaume d’Arabie saoudite. L’avion aurait d’abord fait escale à Dubaï pour récupérer Leïla avant d’atterrir à Djeddah vers minuit.
Aujourd’hui réfugié en Arabie Saoudite, une partie de l’ex-famille régnante, a été installée dans l’ancien palais du roi Fahd. Ancienne coiffeuse, Leïla a épousé son ancien amant Zine EL Abidine en 1992 et lui a donné trois enfants.
Au pouvoir depuis novembre 1987, les deux familles Ben Ali et Trabelsi ont fait main basse sur les richesses et les affaires du pays.  En 2008, le magazine américain Forbes estimait déjà la fortune personnelle du président Ben Ali à 5 milliards de dollars, loin très loin de son ami Kadafi dont la fortune s’élevait à 80 milliards de dollars.
Durant plus de vingt les clans, organisés comme «  La famille » maffieuse, selon un câble de la diplomatie américaine, investissaient dans tout ce qui pouvait faire rentrer de l’argent en Tunisie.  Banques, transport, immobilier, agroalimentaire, hôtellerie, agriculture, grande distribution, télécommunication, rien, mais rien n’échappait à la boulimie des Ben Ali et des Trabelsi. Ceux-ci n’hésitaient pas, le cas échéant, à recourir au racket, aux menaces, aux intimidations et à l’extorsion.

Wikileaks suite

Et que dit le câble révélé par Wikileaks ? Les deux familles qui régent à Tunis depuis l’arrivée au pouvoir du président Ben Ali en novembre 1987 se sont accaparés les richesses du pays. Elles règnent non seulement sur le pouvoir politique, mais elles détiennent presque tous les leviers dans le secteur économique. La propension de la famille dirigeante à verser dans la corruption est telle qu’elle comparée à une « quasi-mafia », affublée du sobriquet « Famille » qui fait référence à celle de la Mafia italienne.Les diplomates américains vont même jusqu’à utiliser le terme de « voyoucratie » pour qualifier le système tunisien.
Les familles Ben Ali et Trabelsi agissent en toute impunité, vivent au dessus de la loi, s’octroient des privilèges y compris en recourant à force et à l’intimidation. Tandis que les membres de la famille s’enrichissent et prospèrent, une grande majorité de Tunisiens se sentent exclus de ces richesses. « Le gouvernement a fondé sa légitimité sur sa capacité à assurer la croissance économique, mais un nombre croissant de Tunisiens croit que ceux qui se trouvent au sommet conservant les avantages pour eux-mêmes », note le télégramme de l’ambassade américaine en Tunisie. Plongée dans le système de la famille vu par les Américains.
Le câble de l'ambassade US
Selon l’enquête annuelle de Transparency International et selon les observations des contacts de l'ambassade, la corruption prend des proportions graves en Tunisie. Que ce soit sous forme de cash, de services, de terrain, de propriété, ou, voire même votre yacht, la famille du président Ben Ali, pourrait le convoiter et obtiendrait ce qu'elle veut. Au-delà des histoires de magouilles de la famille du président, les Tunisiens rapportent qu’ils font face à la corruption même à un niveau plus bas ; aussi bien dans leurs rapports avec la police, les douanes que dans différents ministères.
L'impact économique est évident. Les investisseurs tunisiens craignant le bras long de « la famille » renoncent à faire de nouveaux investissements, ce qui engendre un taux d'investissement faible et un taux de chômage élevé. Ces rumeurs persistantes de corruption, combinées à une inflation en hausse et un chômage en constante augmentation, ont contribué à alimenter la frustration vis-à-vis du gouvernement tunisien et provoqué de récentes manifestations au sud-ouest de la Tunisie.
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Le ciel c’est la limite
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Selon l’indice 2007 de Transparency International, la corruption s’aggrave en Tunisie.  Le classement de la Tunisie est passé de la 43ème place en 2005 à la  61ème place en 2007 (sur 179 pays) avec un score de 4,2 (Avec 1 le plus corrompu et 10 le moins corrompu).  Bien que la corruption soit difficile à vérifier et encore plus difficile à quantifier, nos contacts sont tous d'accord pour dire que la situation va dans la mauvaise direction. Lorsqu'on lui a demandé s'il pensait que la corruption est meilleure, pire ou la même, XXXXXXXXXXXX a lancé un cri d’exaspération : « Bien sûr que c'est pire! ».   Il a déclaré que la corruption ne peut qu’augmenter dès lors que les corrompus cherchent de plus en plus d’opportunités pour s’enrichir.  L’inflation galopante en Tunisie est proportionnelle à la hausse du prix des pots de vin. « Un contrôle coutait 20 dinars, maintenant il peut aller jusqu'à 40 ou 50 Dinars! »
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Tous dans la famille
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La grande famille du Président Ben Ali est souvent citée comme le lien avec la corruption en Tunisie.  Souvent considéré comme une quasi-mafia, une mention oblique de la « Famille » est suffisante pour comprendre à quelle famille vous faites référence. Apparemment la moitié du milieu des affaires tunisiens prétend avoir une alliance par mariage avec la famille Ben Ali, et bon nombre de ces relations sont signalées comme ayant constitué un plus à leur lignée. L’épouse de Ben Ali  Leïla Ben Ali et sa famille élargie - les Trabelsis – provoquent la plus grande colère des tunisiens.
En plus des nombreuses allégations de corruption, les Trabelsi sont souvent critiqués pour leur manque d'éducation, le niveau de leur statut social et leur  train de vie ostentatoire. Alors que certaines plaintes au sujet du clan Trabelsi semblent émaner d'un mépris pour leurs inclinations de nouveaux riches, les Tunisiens font valoir que la puissance des Trabelsi ainsi que leurs abus flagrant du système les font haïr facilement. Le frère de Leila, Belhassen Trabelsi est le membre de la famille le plus notoire, il est notamment connu pour être impliqué dans plusieurs affaires de corruption, allant du nouveau remaniement du conseil de la Banque de Tunisie (Ref B), à l'expropriation de biens et l'extorsion de pots de vin.
Sans évoquer les biens de sa progéniture de côté, les avoirs de Belhassen Trabelsi comprennent une compagnie aérienne, plusieurs hôtels, l'une des deux stations de radios privées tunisienne, des usines d'assemblage automobile, la concession Ford, une société de promotion immobilière, et la liste est longue. (Voir Ref K pour obtenir une liste plus étendue de ses biens.) Pourtant, Belhassen n’est que l'un des dix frères et sœurs connus de Leila, chacun avec ses enfants. Parmi cette grande famille élargie, figure Moncef, son frère et Imed son neveu qui sont des acteurs économiques particulièrement importants.
Le président n’est souvent pas contesté, et de nombreux Tunisiens estiment qu'il est utilisé par le clan Trabelsi et n'est pas au courant de leurs magouilles. XXXXXXXXXXXX  un fervent partisan du gouvernement et membre du XXXXXXXXXXXX, a dit à l'ambassadeur que le problème n’est pas Ben Ali, mais « la famille »  qui va trop loin et qui viole les lois. Néanmoins, il est difficile de croire que Ben Ali ne soit pas au courant du problème de la corruption en constante croissance, ne serait-ce que d’une façon générale. Cela pourrait aussi refléter les divisions géographiques apparentes entre le fief de Ben Ali et celui des Trabelsi ; avec le clan Ben Ali concentré dans  la région côtière du centre et le clan Trabelsi opérant à partir de la grande région de Tunis et par conséquent, générant la majeure partie des ragots.
Le clan de Ben Ali, sa famille, ses enfants et beaux-parents issus de son premier mariage sont également impliqués dans un certain nombre d'histoires. Ben Ali a sept frères et sœurs, parmi eux son frère Moncef  un trafiquant de drogue connu, condamné par contumace à 10 ans de prison par les tribunaux français.  Ben Ali a trois filles de sa première femme Naima Kefi: Ghaouna, Dorsaf et Cyrine. Elles sont respectivement mariées à Slim Zarrouk, Slim Chiboub, et Marouane Mabrouk – tous possédant des pouvoirs économiques importants.
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Cette terre est la votre , cette terre est la mienne
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Avec l’essor de l’immobilier en plein essor et la hausse des prix du foncier, posséder des biens ou des terres au bon endroit peut être une aubaine ou un billet aller simple vers l’expropriation.  L’été 2007, Leila Ben Ali a reçu, à titre gracieux, une étendue de terre de standing à Carthage de la part du gouvernement tunisien dans le but de construire à but lucratif l’Ecole Internationale de Carthage (Ref F). En plus de ce terrain, l'école a reçu un 1,8 millions de dinars (1,5 million de dollars) de don du gouvernement tunisien et en quelques semaines, celui-ci a construit de nouvelles routes et installé des feux de signalisation pour faciliter  l'accès à l’école.
Il est dit que Mme Ben Ali a vendu l'Ecole Internationale de Carthage à des investisseurs belges, mais l'ambassade de Belgique n’a pas encore été en mesure de confirmer ou d’infirmer cette rumeur. XXXXXXXXXXXX a affirmé que l'école a, en effet, été vendue à un prix faramineux, lequel n’a pas été révélé. Il a noté qu’une vente de ce genre est un pur profit puisque Mme Ben Ali a reçu le terrain, les infrastructures, et un grand bonus à titre gracieux.
La construction d'une grande résidence à côté de la résidence de l'ambassadeur est en cours depuis une année. Plusieurs sources nous ont révélé que la maison (en construction) appartient à Sakhr Materi, le gendre du Président Ben Ali, et propriétaire de Radio Zitouna.  Le propriétaire de ce terrain de première qualité aurait été exproprié par les autorités pour le mettre à la disposition de la générale des Eaux, plus tard le terrain a été accordé à Materi pour usage privé. Le propriétaire d’un café a raconté une histoire similaire à un employé de l'ambassade, à qui il a affirmé que Belhassen Trabelsi l'a forcé à échanger un café qu’il détenait dans un emplacement de premier choix contre son café actuel.
Le propriétaire du café a déclaré que Trabelsi lui a dit qu'il pouvait faire tout ce qu'il voulait là-bas ; et que si 50 Dinars de pots de vin à la police ne sont pas suffisants, Trabelsi a assuré au propriétaire qu’il n'avait qu'à l’appeler pour qu’il puisse « gérer l’affaire ».
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Un Yacht recherché
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En 2006, Imed et Moaz Trabelsi, les neveux de Ben Ali, auraient volé le yacht d'un  homme d'affaires français bien introduit, Bruno Roger, président de Lazard Paris. Le vol, rapporté dans toute la presse française, a été découvert quand le yacht, fraîchement peint pour couvrir les caractéristiques pouvant le distinguer, est apparu au port de Sidi Bou Said.
Le poids de Roger dans l’establishment français a créé une source d’irritation potentielle dans les relations bilatérales et selon  certains rapports, le yacht a été rapidement remis à son propriétaire. L’affaire du yacht volé a refait surface au début 2008 en raison d'un mandat d’arrêt d'Interpol contres les deux Trabelsi.  En mai, les frères ont comparu devant les tribunaux tunisiens, dans un effort visant à satisfaire la justice internationale. Les suites de leur affaire n'ont pas été divulugées
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Montre-moi ton argent
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Le secteur financier (S) tunisien reste en proie à de graves allégations de corruption et de mauvaise gestion financière. Les hommes d'affaires tunisiens disent en plaisantant que votre relation la plus importante est celle que vous avez avec votre banquier, ce qui montre l’importance des relations personnelles plutôt qu'un solide business plan pour obtenir un financement. Les conséquences de la fonction bancaire basée sur les relations est un taux de prêts improductifs de 19 pour cent,  ce qui reste élevé mais quand même inférieur à un taux de 25 pour cent en 2001.
Des contacts de l'ambassade sont empressés de faire remarquer que beaucoup de ces prêts sont détenus par de riches hommes d'affaires tunisiens qui utilisent leurs liens étroits avec le régime afin d'éviter le remboursement. Le laxisme fait du secteur bancaire une excellente cible d’opportunités, avec de multiples histoires sur les affaires  de la « Première Famille ». Le dernier remaniement à la Banque de Tunisie (Ref B), dont l’épouse du Ministre des Affaires étrangères assure la présidence et Belhassen Trabelsi nommé au conseil d'administration, est l’exemple le plus récent (de la corruption qui gangrène le secteur financier). Selon un représentant du Crédit Agricole, Marouane Mabrouk, un autre des gendres de Ben Ali, a acheté 17% des parts de l'ancienne Banque du Sud (aujourd'hui Attijari Bank) peu de temps avant sa privatisation. Ces 17% de parts étaient nécessaires pour obtenir des intérêts de contrôle à la banque étant donné que la privatisation ne touchait que 35 pour cent des parts de la banque.
Le Crédit Agricole a déclaré que Mabrouk a vendu ses actions à des banques étrangères et Mabrouk avait reçu un bonus important de la société retenue suite à l’appel d’offre, l’espagnol-marocain, Santander-Attijariwafa une prime significative, XXXXXXXXXXXX a raconté que quand il travaillait encore à la banque, il avait pour habitude de recevoir des appels téléphoniques de clients, pris de panique, qui déclarent que Belhassen Trabelsi leur avait demandé de l'argent. Il n'a pas indiqué s’il leur a conseillé de payer ou non.
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L'effet d'entraînement
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Alors que les histoires de corruption impliquant des familles de haut niveau constituent les cas les plus flagrantes et les plus connus, les Tunisiens disent rencontrer une corruption d’un niveau inférieure et plus fréquemment dans leur vie quotidienne. Un PV pour excès de vitesse peut être ignoré, les procédures d’obtention d’un passeport peuvent être accélérées, et les douanes peuvent être contournées – tout ça en payant le juste prix.
Les dons du gouvernement tunisien au profit du Fonds 26-26 pour le développement ou à la Société Bessma pour les handicapés - organisme de bienfaisance préféré de Leila Ben Ali - sont également soupçonnés de graisser les roues. Un membre du Parlement bien introduite, a fait face à une pression accrue des autorités pour avoir refusé plusieurs « demandes » de dons en faveur de l’équipe de football Trabelsi.  XXXXXXXXXXXX a signalé que les inspecteurs des douanes lui ont réclamé 10.000 dinars pour le dédouanement de sa marchandise, il n'a pas révélé s’il a donné suite à la demande.
Le népotisme joue aussi un rôle important dans l'attribution des bourses et des emplois. Connaître les bonnes personnes au ministère de l'enseignement supérieur peut déterminer l'admission dans les meilleures écoles ou peut faciliter l’obtention d’une bourse d’études à l'étranger. Un employé local de l'ambassade a déclaré que le Directeur de la Coopération internationale, un contact de longue date, a offert de donner à son fils une bourse d'études au Maroc sur la base de leur connaissance. Si vous ne connaissez pas quelqu'un, l'argent peut également faire l'affaire.
Beaucoup d'histoires rapportent que des Tunisiens ont payé des commis au ministère de l'Enseignement supérieur pour inscrire leurs enfants dans de meilleures écoles que celles correspondants à leurs résultats scolaires.  Les emplois au sein du gouvernement – une récompense en Tunisie - sont attribués en fonctions des liens et des connaissances.  La défunte mère de Leila Ben Ali, Hajja Nana, est aussi signalée comme ayant agi à titre de courtier pour les admissions scolaires et les offres d’emplois au gouvernement, elle fournissait ses services en échange de commissions.  Parmi les plaintes déposées par les manifestants dans le bassin minier de Gafsa, il y a des allégations selon lesquelles des emplois à la société des phosphates de Gafsa ont été attribués sur la base de connaissances et de corruption.
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Voyoucratie
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Les nombreuses histoires de corruption familiale sont certainement pénibles pour de nombreux Tunisiens, mais au-delà des rumeurs liées à l’accaparement de l’argent, il ya une frustration par rapport au fait que les gens ayant des connaissances vivent au dessus de la loi.  Un citoyen déplore que la Tunisie n'est plus un Etat policier, c’est désormais un état dirigé par la mafia. «Même la police rend compte à la famille! » s'écrie-t-il.
Avec ceux d'en haut qui sont les pire délinquants, et qui sont susceptibles de rester au pouvoir, il n'ya pas de contrôles au sein du système tunisien. La fille d'un ancien gouverneur a raconté que Belhassen Trabelsi s’est introduit, en colère,  dans le bureau de son père -  il a même bousculé un employé âgé le faisant tomber par terre – après qu’on lui ait demandé de respecter les lois exigeant une police d'assurance pour son parc de jeux. Son père a écrit une lettre au président Ben Ali pour défendre sa position et dénoncer l’agissement de Trabelsi. La lettre est restée sans réponse, et il a été démis de ses fonctions peu de temps après.
La forte censure que le gouvernement impose à la presse fait que les histoires de corruption de la famille ne sont pas publiées. La corruption de la famille du président reste une ligne rouge que la presse dépasse à ses risques et périls. Bien que l'incarcération du comédien Hédi Oula Baballah en février ait été sois-disons liée à la drogue, des groupes de défense des droits de l’homme soupçonnent que son arrestation soit une punition pour son one man show de 30 minutes dans lequel il parodiait le président et sa belle famille. Les ONG internationales considèrent que les conditions difficiles d’incarcération du journaliste Slim Boukdhir, incarcéré pour avoir refusé de présenter sa carte d'identité et insulté un agent de police, sont directement liées à ses articles dénonçant la corruption du gouvernement. La corruption reste un sujet dont on parle à voix basse avec un regard rapide au dessus des épaules.
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Un éléphant dans une pièce
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Plusieurs économistes tunisiens soutiennent que la question n’est pas de savoir si la corruption augmente vraiment en raison «Perception est la réalité ». La perception que d’une corruption ex-croissante ainsi que les rumeurs persistantes sur des comportements douteux ont un impact négatif sur l'économie indépendamment de la véracité des allégations. Des Contacts nous disent qu'ils ont peur d'investir par crainte que la famille ne veuille brusquement obtenir sa part du gâteau. « Quel est le problème? » s’interroge A. B demandé. « Le scénario le plus plausible est que mon investissement réussie, mais que quelqu'un d'important essaie de prendre sa part. » La persistance de faibles taux d'investissement domestiques accrédite cette idée.

Des comptes bancaires étrangers, en situation illégale, sont monnaie courante. Une récente amnistie du ministère des Finances  visant à encourager les Tunisiens à rapatrier leurs fonds a été un échec patent. B. a déclaré qu'il envisage d'intégrer ses nouvelles activités en Mauritanie ou à Malte, de peur de faire  face à interférences indésirables. De nombreux économistes et gommes d'affaires notent que l’importance des investissements dans l'immobilier et dans le foncier  reflètent le manque de confiance dans l'économie et un effort pour garder leur argent en sécurité.
Jusqu'à présent, les investisseurs étrangers n'ont pas été découragés, et selon des contacts d'affaires tunisiens, ils n’ont pas été menacés. Les investissements étrangers continuent à affluer à un rythme soutenu, même en excluant les privatisations et les grands projets du Golfe qui n'ont pas encore commencé. Les investisseurs étrangers signalent avoir rarement rencontré le type d'extorsion rencontrés par les Tunisiens, peut-être qu’ils s’appuient sur leurs propres ambassades et leurs gouvernements.
Le représentant de British Gas a déclaré l'ambassadeur n’avoir rencontré aucune irrégularité. XXXXXXXXXXXX a déclaré que, plusieurs années plus tôt,  Belhassen Trabelsi a tenté un bras de fer avec une société allemande spécialisée dans production dans le secteur offshore, toute après  l’intervention de l’Ambassade allemande, Trabelsi a été explicitement mis en garde d’éviter de s’attaquer aux  sociétés offshore. En dépit des déclarations sur l'augmentation des investissement locaux, les pouvoirs publics mettent l'accent sur l'augmentation des IDE ( investissements directs étrangers ), particulièrement dans le secteur de l’offshore.

Néanmoins, il existe encore plusieurs exemples d’entreprises ou d’’investisseurs étrangers qui font  l'objet de pressions afin de s’associer avec  le «bon» partenaire. Le meilleur exemple l’échec de McDonald's à faire son entrée en Tunisie. Lorsque McDonald's a choiside limiter sa présence en Tunisie à une franchisé, ce qui n’était pas le choix  du gouvernement tunisien, toute l'affaire a été sabordée par le refus du gouvernement d'accorder les autorisations nécessaires et le refus de McDonald's de jouer en octroyant la franchise à des membres de l’entourage de la Famille.
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Commentaire
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Bien que la petite corruption existe, ce sont les aexcès de la famille du président Ben Ali qui inspirent l'indignation chez les Tunisiens. Alors que les Tunisiens font face à une inflation en hausse et taux de chômage élevé, l’étalage des richesses et les rumeurs persistantes sur la corruption servent de carburant pour alimenter l’incendie. Les récentes manifestations dans la région minière de Gafsa fournissent un puissant rappel du mécontentement qui reste largement sous la surface. Le gouvernement a fondé sa
la légitimité sur sa capacité à assurer la croissance économique, mais un nombre croissant de Tunisiens croit que ceux qui se trouvent au sommet conservant les avantages pour eux-mêmes.

La corruption est un problème à la fois politique et économique. Le manque de transparence et de responsabilité qui caractérisent le système politique en Tunisie constituent un fléau pour l'économie, détériorant ainsi le climat d'investissement et alimentant une culture de la corruption. Pour tous les discours d'un miracle économique tunisien et toutes les statistiques positives, le fait que les investisseurs tunisiens rétrécissent en dit long. La corruption est un éléphant dans une pièce, c’est un problème que tout  monde connaît, mais que personne ne peut publiquement reconnaître.
Traduction DNA

Le Monde

Tunis, envoyée spéciale - Cet homme n'est ni grand ni petit. On ne peut pas le décrire. Il n'a pas de nom. Il faut lui en inventer un : Zyed. Il se terre dans une maison du quartier Bardo, à Tunis, qu'il fait surveiller depuis la rue par de jeunes parents, les nerfs à fleur de peau. "Je change d'endroit toutes les heures", dit-il en refoulant des larmes.

Conseiller de Zine El-Abidine Ben Ali au palais de Carthage, il avait pris contact de sa propre initiative quelques jours avant la chute de l'ex-président parce que, disait-il, il ne voulait pas "être complice des massacres". Pour le rencontrer, ce dimanche 16 janvier, il faut suivre des émissaires à travers un dédale de rues.
Zyed tente aujourd'hui de fuir la Tunisie, mais son passeport français, qu'il exhibe trop brièvement, est faux. Son récit, souvent interrompu par le bruit de tirs tout proches qui le font violemment sursauter, met en scène les intrigues d'un clan familial sclérosé et une fin de règne agonisante bien avant le début, le 17 décembre 2010, des émeutes en Tunisie. "Il régnait une atmosphère délétère au palais, souligne-t-il. En septembre, il y a eu un accrochage très sérieux entre le président et sa femme, et, à partir de là, la présence de son frère Belhassen et de son fils Imed est devenue de plus en plus forte."
L'ancien conseiller avance aussi le nom de Slim Chiboub, marié à Dorsaf Ben Ali, la fille de l'ancien président, mais écarte celui d'un autre gendre, très en vue, Sakhr El-Materi, décrit comme "un requin qui n'a pas de dents".
"QU'IL CRÈVE"
En octobre, ce clan aurait mis au point, selon lui, un scénario "diabolique" consistant à laisser "le président en poste jusqu'en janvier 2013, puis sa démission aurait été annoncée pour raison médicale, suivie d'un appel pour des élections". Les partis "amis" auraient été instrumentalisés pour créer une polémique en présentant de faux candidats. Des manifestations organisées un peu partout par le RCD, le parti du pouvoir, se seraient conclues par une "manif monstre d'un million de personnes à Tunis pour réclamer la candidature de Leïla".
Mais, le 17 décembre, le suicide de Mohamed Bouazizi, immolé par le feu, change tout. "Ben Ali était totalement indifférent, il a dit quelque chose comme : 'Qu'il crève'. A ce moment, Abdelwahab Abdallah est devenu le véritable régent, et Abdelaziz Ben Dhia le filtre sans qui rien ne passait." Ali Sériati, le chef de la garde présidentielle, fait partie du dispositif.
L'ancien conseiller décrit des acteurs de plus en plus fébriles au fur et à mesure que le mouvement de révolte prend de l'ampleur dans le pays. Le 29 décembre, au lendemain du premier discours du président, il assiste à une réunion de crise. "Abdallah a dit : 'Il faut que tout ça soit manipulé par un groupe affilié à Al-Qaida au Maghreb islamique. Pour nos amis français, c'est la seule solution.' Ce à quoi a répondu Ben Ali, très cynique: 'AQMI en Tunisie, c'est la mort du tourisme, on va se suicider'."
DES APPELS D'ERIC RAOULT
Aux Américains, un même argument devait être présenté : Kasserine, la ville où les manifestations ont été les plus durement réprimées, était un "foyer islamiste". "Il y a eu un air de fête après les déclarations de Michèle Alliot-Marie lorsqu'elle a proposé d'aider à former des policiers tunisiens, poursuit Zyed. Et Eric Raoult appelait tout le temps pour dire qu'il ne fallait pas ouvrir la brèche aux islamistes ; Abdallah l'avait surnommé la 'passerelle'."
Contacté, M. Raoult reconnaît avoir "appelé souvent", mais, assure-t-il, "des amis comme Charfeddine Guellouz ou Habiba Massabi [députée RCD], pas la présidence, ce n'est pas de mon niveau".
La situation, cependant, s'aggrave en Tunisie. Le conseiller, qui révèle que l'ancien chef de l'Etat s'était réfugié dans sa propriété d'Hammamet avant de quitter le pays et avait préenregistré son dernier discours, rapporte cette dernière réunion : "Sériati a prévenu que les militaires, ces 'fils de bâtards', a-t-il dit, fraternisaient avec la population. Il a ajouté: 'Peut-être on partira, mais on brûlera Tunis : j'ai 800 bonhommes prêts à se sacrifier. Dans deux semaines, les mêmes qui manifestent vont nous supplier de reprendre les choses en main.'" Zyed, alors, est parti de son côté.
Isabelle Mandraud

Arrestation de l'ex-chef de la sécurité de M. Ben Ali