mardi 25 janvier 2011

Tunisie : de la difficulté de libérer une presse aux ordres

Le 14 janvier 2011, le peuple tunisien a arraché sa liberté à une dictature qui a duré vingt-trois ans. Le 23 janvier, même la police, symbole et outil de l'oppression politique en Tunisie, a brisé les chaines et a dénoncé le comportement passé de sa direction.
Tous les secteurs sont en train de chercher le chemin de leur liberté et surtout la voix de leur indépendance. Mais où est la presse tunisienne dans ce mouvement historique ?
Le 13 janvier, tous les médias ou presque ont affiché leur volonté de rompre avec la propagande et la censure au service du pouvoir politique. Mais, au bout de dix jours seulement, cette volonté devient de plus en plus faible et de moins en moins fiable.
Les preuves d'une manipulation médiatique et d'un discours uniforme se multiplient. Certains journalistes commencent à renouer avec leurs mauvaises habitudes ; d'autres se soumettent sans réagir aux décisions de rédacteurs en chef qui ne songent qu'à soutenir, par réflexe et par principe, ceux qui détiennent le pouvoir, simplement parce qu'ils sont au pouvoir.

La critique de la dictature est une diversion

Aujourd'hui, la liberté d'expression des médias se réduit à deux phénomènes qui résument l'offre d'informations aux citoyens tunisiens.
  • la critique de l'ancien régime : elle ne dépasse pas la démonstration, imprécise, des crimes dévoilés après le départ de Ben Ali.
  • la prolifération de débats (talk shows) sur les plateaux des chaînes de télévision. Chaque soir, les différents sujets qui sont abordés tombent toujours dans les même piège : la diffamation, le règlement des comptes et les querelles inutiles (comme le cas d'Hannibal TV).
Critiques faciles et vagues de l'ancien régime et règlements de comptes sont les deux dimensions d'une dérive malsaine de l'information, dérive qui s'apparente à une nouvelle forme de manipulation médiatique.
Il y a manipulation, en effet, quand les organes de presse se servent de Ben Ali, désormais inoffensif, pour détourner l'attention des citoyens.
Prenons l'exemple du lynchage médiatique des personnages et personnalités qui gravitaient autour du couple Ben Ali. Ce bruit médiatique rempli de sensationnalisme et d'émotionnel donne l'illusion d'une liberté d'expression qui n'existe toujours pas en Tunisie.
Critiquer et accuser un régime déchu est la chose la plus facile à faire. Mais derrière ce lynchage se cache un objectif d'une opération de diversion : faire croire au peuple tunisien qu'aujourd'hui son seul ennemi est « Ben Ali ».
Les médias tunisiens continuent à montrer l'ancien régime comme le seul danger qui nous guette encore. En ne désignant qu'un seul danger, au demeurant factice, les médias tunisiens détournent l'attention du peuple tunisien et occultent, de fait, les autres menaces, bien réelles, elles.

Trois preuves de la manipulation médiatique

Et pourtant… le RCD, parti du dictateur déchu, continue à régenter le gouvernement de transition. Quelques témoignages contiennent les indices de la manipulation médiatique.
  • une journaliste qui travaille sur un site Internet réputé et qui affirme que son rédacteur en chef lui a strictement interdit de faire des investigations sur les documents détruits par quelques responsables ; or, ces documents auraient pu servir de preuves tangibles sur les crimes du régime de Ben Ali
  • un autre journaliste de la chaîne nationale affirme que les coups de fil passés en direct sont filtrés. Il précise que la régie prépare une liste dont les interlocuteurs sont sélectionnés en avance
  • ce même journaliste a même témoigné à propos d'un débat mis en scène de A à Z dans les coulisses. Et il nous a confié que plus que la moitié des émissions sont enregistrées pour ne pas risquer un dérapage quelconque

Questions dociles au Premier ministre Ghanouchi

Ces derniers jours, l'effort des médias se concentre sur la promotion et le soutien du gouvernement provisoire. La preuve la plus récente est l'interview du Premier ministre Ghanouchi, diffusée vendredi sur la chaîne nationale.
Devant les questions dociles des journalistes, Mohamed Ghanouchi a su influencer une grande partie du peuple tunisien. Les plans rapprochés sur ses larmes n'ont laissé personne indifférent, montrant la volonté -pas si innocente que cela- de gagner l'émotion, la compassion et la compréhension des téléspectateurs avec des techniques cinématographiques, bien connues des spécialistes.
Le découpage de cette interview montre surtout la complicité de la chaîne nationale avec le gouvernement provisoire.
Cette même interview a fait la une de la majorité des journaux, radios et sites Internet du samedi 22 janvier. La presse dans son ensemble n'a pas hésité à ajouter des commentaires positifs en faveur du premier ministre présenté comme l'incarnation de la « rupture avec l'ancien régime ».
Tout se passe comme si pour certains journalistes tunisiens la soumission automatique au Pouvoir était un réflexe conditionné issu de leur « bon vieux temps ».

Les débats télévisés ne servent qu'un seul point de vue

Autre exemple de conformisme anachronique, au niveau des débats organisés par la télévision et la radio : face aux manifestations qui continuent dans toute la Tunisie, les médias sont -encore une fois- tous d'accord pour suggérer la « frivolité » de ces manifestations ; insinuant ainsi que les manifestations qui ont abouti à la libération de notre pays avaient été, elles, des actes de violence et… de terrorisme.
Sans le moindre souci d'objectivité, les médias persistent à critiquer par tous les moyens les demandes des manifestants. Débats, interviews et même les news n'argumentent qu'à partir d'un seul point de vue :
« Nous n'avons pas de meilleure solution que le gouvernement provisoire dominé par les anciens du RCD. »
Et l'argument le plus fort, le plus utilisé aussi, est, bien sûr, la sécurité, l'équilibre et la sérénité du pays qui sont mises en danger, d'après nos médias, par ces manifestations pacifiques.
C'est un curieux détournement du débat que de l'organiser autour d'un seul point de vue. Le débat, c'est par définition, la discussion ouverte à partir de plusieurs points de vue. Multiplier les débats fermés ressemble fort, là encore, au vieux réflexe conditionné par le seule point de vue qui prévalait, naguère, celui de Ben Ali.
Depuis des décennies, le peuple tunisien s'est habitué à considérer les médias nationaux et même privés comme l'un des acteurs les plus puissants de la société du spectacle.
Mais le plus grave, après la révolte du 14 janvier, est de constater que nous n'avons plus beaucoup de chance d'avoir des médias libres, des médias qui se comporteraient comme des outils politiques indispensables à l'éclosion d'une vraie démocratie.
Car, il est clair que nos journalistes, précisément la majorité, renoncent à leur tâche la plus urgente : construire un espace libre de discussion et de réflexion.
Il est aussi clair que nos médias cèdent, sous ou sans pression (une enquête peut le prouver), à l'unique fonction de propagande et de censure qui était leur fonction sous la dictature.

Censure, manipulation et violation de la déontologie… Nous y sommes encore !



Tap


  Si la censure persiste encore sur internet (I), au niveau de la chaîne nationale, c’est encore plus grave, puisque manipulations et violations de la déontologie sont des pratiques ayant encore cours (II)
I.— La perpétuation de la censure sur Internet
S’agissant de l’internet d’abord, m’aurait-on dit qu’après la chute de Ben Ali, l’incarnation du visage de « Ammar 404 » (la censure de l’internet en Tunisie) deviendrait celle de Slim Amamou et de l’Atugien Sami Zaoui Secrétaire d’Etat chargé des TIC, j’aurai sûrement répondu par un sourire ironique.
Pourtant, c’est ce qui semble être devenu le cas lorsque je découvre la dépêche de la TAP qui rapporte : « L’accès à tous les sites web en Tunisie est libre, à l’exception des sites au contenu portant atteinte aux bonnes mœurs, comportant des éléments violents ou incitant à la haine, a annoncé le secrétariat d’Etat des technologies de la communication, dans un communiqué rendu public vendredi. Une adresse mail contact@web-liberte.tn est mise à la disposition des citoyens et des composantes de la société civile pour toute réclamation en relation avec la liberté d’expression sur Internet. (TAP – TUNIS, 22 jan 2011) »


Tap


  Ce qu’il y a de fâcheux dans ce communiqué, c’est l’absence de toute référence à la justice pour suspendre un site internet. Le seul progrès par rapport au passé, c’est la possibilité de contacter quelqu’un (allez savoir qui ?) via une obscure adresse mail “contact@web-liberte.tn”.
Pour le reste, on constate la perpétuation d’une police discrétionnaire et non moins arbitraire qui semble s’arroger ce qui doit relever de la seule compétence des tribunaux.
Etait-ce un communiqué isolé et maladroit ?
En tout cas, je constate en navigant que ce n’est pas aussi isolé que cela puisque sur certaines pages, la censure est encore de mise et toujours selon les formes propres aux dictatures. Voici ce qui désormais apparaît sur les pages bloquées en Tunisie :


Censure-Tunisie-PostBenAli


  On relève que sur la forme, hormis l’ancien mensonge de l’erreur 404, nous avons à présent « quelqu’un, quelque part » qui revendique cette censure. Pour le reste, les caractéristiques de la police de l’internet demeurent identiques à celle de Ben Ali. Des individus, derrière des écrans, décident discrétionnairement ce qui est accessible ou pas aux Tunisiens. Aucune décision de justice n’est mentionnée et aucune référence à un texte légal non plus (et bon courage à celui qui en sortira une de sa manche !).
Face aux sévères critiques que j’ai formulées sur twitter, le Secrétaire d’Etat au TIC Sami Zaoui abonde pourtant dans le sens de la seule compétence des tribunaux :


Tweet Sami Zaoui


  Néanmoins, comme déjà relevé, cela demeure au niveau d’un discours contredisant ce que l’on observe en navigant sur internet. D’autre part, ce n’était pas exactement ce qu’indiquait le communiqué publié par la TAP.
Plus stupéfiant, ce sont les tweets de @slim404 nouveau secrétaire d’Etat à la jeunesse en réponse à mon grand étonnement devant le maintien de la censure :


Tweets - Slim Amamou


  Ainsi, plutôt que de lever la censure totalement, on garde une liste des sites bloqués et quelqu’un se charge selon ses humeurs, sa morale, ses convictions de lever ou pas la censure (« décensurer»)
Slim Amamou comme Sami Zaoui reprennent à leur compte cette aberration de la censure discrétionnaire ; celle qui excipe de la pornographie, la pédophilie et le terrorisme pour justifier le pouvoir exorbitant et non moins tyrannique d’un tuteur protégeant les citoyens contre les vilains terroristes et pornographes.
Pourtant, on aura beau se contorsionner, l’argument de la pornographie est intenable. Du reste, l’affirmation selon laquelle « les Tunisiens ne veulent pas des sites pornos » — et à supposer qu’elle soit fidèle— ne signifie nullement que les Tunisiens acceptent de déléguer le filtrage de l’internet à une administration sous prétexte de les protéger des sites qu’ils ne souhaitent pas voir. D’autre part, pour ceux qui cherchent à accéder à l’information, il est tout aussi inadmissible qu’un bureaucrate censeur décide ce que le spécialiste en obstétrique, en MST ou le chercheur en sociologie des mœurs aient le droit de lire ou pas.
Qu’il y ait de « vieux croûtons » dans le gouvernement de transition qui soient prêts à sacrifier la liberté de l’internet sous le prétexte de préserver la société des dangers qui heurtent la morale, cela ne m’étonnerait guère. Qu’ils soient sincères dans leur vision du monde et de la morale, je peux le penser également. Mais, le problème c’est que ces derniers vivent encore dans le siècle dernier. Et je ne suis pas certain qu’ils soient en mesure de réaliser que la seule et UNIQUE garantie effective — et je mesure mes mots — contre tout glissement ultérieur vers un extrémisme de gauche, de droite ou religieux, c’est la liberté totale des médias, à commencer par celle d’accéder à l’internet.
Je l’ai déjà écrit, je fais partie de ceux qui sont terrorisés à l’idée de laisser un enfant seul devant un ordinateur connecté à internet. Mais je suis encore plus terrorisé à l’idée de transmettre une dictature à mes enfants. Les vieux croûtons qui sont prêts à sacrifier nos libertés pour satisfaire leur vision de la morale ne seront plus là dans une dizaine d’années. En revanche, mes enfants seront encore là et moi avec. Ne pas réaliser l’importance capitale d’un internet non soumis à la censure dans les années à venir pour préserver la démocratie des rédempteurs religieux, c’est jouer avec le feu qui brûlera les ailes de la nouvelle démocratie tunisienne.
Enfin, signalons la pétition d’un groupe d’internautes tunisiens très mécontent du maintien de la censure et qui demande l’arrêt total de toute forme de censure. Cette pétition demande également de laisser la responsabilité au citoyen de filtrer lui-même ce qui est susceptible de lui porter préjudice.
II.— Les atteintes à la déontologie sur la télévision nationale
Le 23 janvier 2011 survient un cataclysme dans l’audio visuel tunisien. Une parmi les trois chaînes à couverture nationale -Hannibal TV- est suspendue sans aucune forme de procès. Un écran noir remplace ses émissions. Cette suspension va durer jusqu’à 20h10.
Comment cela a eu lieu, qui l’a ordonnée et selon quelle procédure ? Nous ne le savons toujours pas.
Face à ce grave dérapage, le ministre du gouvernement de transition, A. Chebbi, prend en charge devant les médias le désamorçage de cette grave bévue. Il formule des excuses publiques et déclare que son gouvernement n’y est pour rien. Quant à savoir qui est derrière cette suspension, il s’est refusé à donner une quelconque information.
Ce qui est particulièrement inquiétant depuis la chute de Ben Ali, c’est cette opacité que l’on relève tous les jours concernant un certain nombre de décisions importantes. Et à ce propos également, tous les jours des informations affluent sur des arrestations de présumés collaborateurs avec l’appareil répressif de ben Ali, sans la moindre précision de « qui fait quoi ». Aucun porte-parole du ministère de la Justice ou du ministère de la Défense ne donne de détails sur les procédures suivies. Le pouvoir judiciaire, en terme de communication tout au moins, demeure le grand absent.
Quant à télévision nationale, elle ne parvient toujours pas à se défaire de l’une de ses plus dégradantes habitudes. La manipulation et la désinformation sous le couvert de la «source autorisée».
Une chaîne à couverture nationale est suspendue et, aussi invraisemblable que cela puisse paraître, la présentatrice du journal télévisé de 20h de la chaîne publique l’annonce comme s’il s’est agi de la météo.




  Et tout aussi invraisemblable, la présentatrice indique le plus naturellement au monde qu’elle tient ses informations d’une «source autorisée» (“masdar mâadhoun“). Un dictateur s’est fait virer et près d’une centaine de Tunisiens sont tombés, entre autres pour bannir ces «sources autorisées», mais la présentatrice n’est toujours pas au courant !


Censure Tunisie PostBenAli TVN 23-1-20011


  Plus impardonnable, la présentatrice lit le communiqué de cette « source autorisée» qui accuse le patron de la chaîne et son fils de crime de haute trahison, et ce, en faisant fi des règles déontologiques les plus élémentaires. Le rédacteur en chef du nouveau cru de la chaîne nationale ne sait toujours pas ce que signifie la présomption d’innocence. Du reste, la détention de l’Arbi Nasra et de son fils ne durera que quelques heures. Ils sont actuellement libres.

The Dictator is gone but not the dictatorship. We haven’t done anything yet.


Ben Ali is gone, but the regime is still there. This interim government must be purged of the old regime’s men. This is why I think we should not trust this government:

1. Mr Ghannouchi’s government did not unequivocally state that they will make every possible effort to get Ben Ali extradited to face justice in Tunisia. Mr Ghannouchi was still in contact with him after he left and there are credible rumours that the prime minister even mediated to get the dictator asylum.

2. This interim government is yet to send a full list of names for the Ben Ali – Trabelsi clans so that their accounts in foreign banks are frozen. Switzerland had to identify its own list of suspect accounts. France and other countries have taken preemptive measures but not based on an exact list from the Tunisian government. Even if this measure is finally taken by the government, the lack of urgency in dealing with this issue and the lack of transparency concerning who from the clan was arrested dealt Mr Ghannouchi’s government a huge credibility blow in the eyes of the public.

3. National TV does not look very free to me. Some people seem to be still pulling the strings and controlling the agenda of most programs. One example, early news programs reporting the demonstration which started in Sidi Bouzid and headed for Tunis to bring down the government said that their demands were “political and social” refusing to be any more explicit. They only admitted the specific demands later when it was clear the size of the demonstration was growing and it was turning into an open ended sit-in in the Kasbah. In so called round-tables, I very rarely see guests calling for the old regime’s men to go. I also rarely see guests representing parties who have been outspoken against the interim government, such as Marzouki’s CPR party and others.

4. The ministers who served under the old regime seem to be clinging to their positions at any cost. Their argument is continuity. This is laughable. Continutity can be assured by them making themselves available to an independent transition government whenever they are needed. Logistically, they can even work side by side but leaving the decision making power in the hands of the independents. Besides, we all now that continuity is guaranteed by the high-level and mid-level civil servants working under the minister, and not by the minister himself. This is why former Presidents H. Bourguiba as well as Z. A. Ben Ali moved their reliable men between the ministries of Sports, Information, Tourism, etc. regardless of their academic and professional experience. The position of a minister is a political one, tasked with drafting policies and long-term strategies and communicating with the public and other institutions at a political level. He or she is not tasked directly with operational day to day issues, which are usually delegated and are not reviewed on a daily basis.

5. Reports from patriotic Tunisians in various ministries and courts that critical documents are being destroyed. These documents are the only way to indict those who collaborated with the mafia of the old regime. A big clean-up is undergoing right now in the various “important” ministries and institutions. This cleanup is as widespread as the spread of the corruption under the old regime, where a big “royal clan” and their collaborators in the system were above the law for over a decade. This cleanup includes also the Ministry of Interior, where efforts are probably focusing on reducing as much as possible all evidence of torture and other serious abuses. There are even those who speculate that the burning of some prisons early on after the dictator fled was an attempt to get rid of the biggest piece of evidence, the prisoners who were tortured themselves. This morbid theory, while I hope is wrong, is a reflection in any case of the little trust the population has in this current caretaker government.
It is urgent that we get our economy back on track as soon as possible and start the rebuilding process. It is also urgent that we focus on the short-term basic needs of vulnerable people especially, many of whom lost their livelihoods in the disturbances which broke out after the dictator fled. This will only happen if people get an interim government that they accept and trust. The Tunisian people are very aware that democracy requires institutions and free and fair elections, and these cannot emerge out of a government that served under a dictator for two decades. Life does not emerge out of the dead. Only God can do that. The interim government must be formed of independents who have real credibility, personalities from academia and civil society who demonstrated their passionate belief in the values of freedom and democracy. Mr Ghannouchi must yield to popular demand for the country’s sake. We cannot change the population, so his government ought to go.

Khalil Amiri
London, 23/1/2011

Tunisia is also this...

La Tunisie c'est aussi ça, alors voici une petite pause "réconfort", et tout le monde reste les bienvenue en Tunisie, ou presque.. Michèle Alliot Marie, Frédéric Mitterand, Bruno Lemaire et d'autre qui se reconnaitront.

:)


Please, never forget! Never forget!




L'Alliance Fédéraliste Bretonne

L'Alliance Fédéraliste Bretonne exprime sa sympathie au Peuple tunisien. Après le renversement du régime autoritaire de Ben Ali, régime malheureusement soutenu pendant 2 décennies par les gouvernants français de gauche ou de droite, il faut souhaiter que ce pays se trouve rapidement doté d'une nouvelle constitution garantissant la démocratie, la stabilité et la prospérité économique. 

An Emglev Kevredel Breizh a zo en em tiskleriañ skoazh-ouzh-skoazh gant ar Pobl tunisiek. Goude ar reveursi hag en deus lakaet Ben Ali da dec'hout kuit, koulskoude dezhañ da vezañ bet skoazellet gant ar goarnamanchoù gall( tu dehou ha tu kleiz ), spi hon eus hag e vo savet dizale ur vonreizh nevez gouest da zichenniñ an demokratelezh, an ingalded hag al lañs ekonomikel.

Le Président / Ar Prezidant,
J-L Le Mee. ■

les visas révoqués

Les visas diplomatiques américains des anciens membres du gouvernement tunisien ainsi que ceux octroyés aux membres de leur famille ont été révoqués, a annoncé l'ambassade des Etats-Unis d'Amérique à Tunis dans un communiqué parvenu lundi à l'Associated Press.
Selon la même source, le département d'Etat américain poursuivra cette mesure de révision au fur et à mesure que le gouvernement tunisien prendra forme et révoquera les visas de ceux qui ne seront également plus éligibles.

Le capitalisme préfère-t-il la dictature ?

Par Hervé Gattegno
Le capitalisme s'accommode de la dictature. En Tunisie, la démocratie est encore fragile puisqu'elle dépend du soutien de l'armée. Et la situation économique est très inquiétante. On peut comprendre que la France ne veuille pas se mêler de l'avenir politique du pays - à part approuver la démocratie, on ne voit d'ailleurs pas ce que Nicolas Sarkozy pourrait faire de plus. En revanche, je ne vois pas ce qui l'empêchait d'offrir le soutien de la France à l'économie tunisienne. Il ne l'a pas fait - ou alors du bout des lèvres. Et là, on est obligé de se demander pourquoi.
Il est difficile de soutenir que la France défend les droits de l'homme partout sauf dans les pays liés à la France par l'histoire. Au demeurant, Nicolas Sarkozy s'est montré moins "réservé" avec la Côte d'Ivoire. Donc on peut regretter qu'il n'ait pas trouvé de mots pour dire que la France offrira sa garantie, et même qu'elle prêtera au nouvel État tunisien - quand il sera vraiment en place - l'argent dont il aura besoin pour relancer l'activité économique. Il s'est passé quelque chose d'incroyable la semaine dernière : deux grandes agences de notation ont baissé la note de la Tunisie, c'est-à-dire qu'elles ont jugé que la capacité du pays à rembourser ses dettes avait diminué avec la chute de Ben Ali. La conséquence, c'est que la Tunisie va devoir emprunter sur les marchés financiers à des taux d'intérêt plus élevés. La démocratie part donc avec un handicap. Et ça, c'est inacceptable !
Le cynisme du capitalisme financier
Tout est là : ces agences ne raisonnent que d'un "strict point de vue financier". On l'a vu au moment de la crise des subprimes : tous les placements les plus toxiques avaient reçu des notes excellentes. Sur le papier, tout était parfait, mais ce n'était que du papier ! Les mêmes agences - que Nicolas Sarkozy a dénoncées mille fois - ne jurent que par la Russie et la Chine, mais il est vrai que ce ne sont pas des pays qui sont menacés par "l'instabilité politique". Dans le cas de la Tunisie, on peut donc bien conclure que le capitalisme mondial - à travers les agences de notation - affirme clairement, et cyniquement, qu'il aurait préféré que la dictature reste en place. On aurait aimé entendre Nicolas Sarkozy dire, au nom de la France, qu'il ne partage pas cet avis.
Peut-être que, grâce à la présidence du G20, la France va retrouver sa voix. Certes, au G20 on ne parle pas de démocratie mais de capitalisme. Et on a compris que ce sont deux choses différentes. Mais, comme on y parle beaucoup de régulation, peut-être que Nicolas Sarkozy pourrait contribuer à ce que les États décident de réguler la finance par la démocratie. Ce serait une belle revanche pour les Tunisiens. S'il y avait des agences de notation pour l'honneur en politique, la France pourrait retrouver la moyenne.

Sarkozy sur la Tunisie : un pas en avant, trois pas en arrière

Lors de la la troisième conférence de presse de son quinquennat, Nicolas Sarkozy n'a évoqué que les questions de politique étrangère, axant ses interventions sur la présidence française du G20 et la Tunisie. Sur ce dernier point, le président a admis quelques défaillances diplomatiques, invoquant surtout le principe de non-ingérence et l'histoire qui unit les deux pays pour expliquer les cafouillages français.



Sarkozy sur la Tunisie : un pas en avant, trois pas en arrière

A l’occasion de la troisième conférence de presse de son quinquennat, le président de la République avait bien fait passer le message : il ne serait question que de politique étrangère. De la hauteur ! « Opération Re-Présendialisation »: pas question de réunir la presse pour aborder les questions de politique intérieure. 

Contrat rempli. Nicolas Sarkozy a donc passé en revue l’actualité internationale, insistant sur deux axes majeurs : le G20 et la Tunisie. Il a annoncé la tenue, à la veille du sommet de Deauville, d'un forum sur l'Internet avec les principaux opérateurs du secteur des pays du G8. Assurant qu’il ne s’agirait « en aucun cas » de brider la Toile, quelques semaines après les révélations de Wikileaks, le Président a  estimé qu’« Internet ouvre pour les responsables que nous sommes de grands sujets de réflexion ».

Nicolas Sarkozy a listé tous les dossiers que la France entendait pousser, annonçant une présidence française sociale: « la France est favorable à une taxe sur les transactions financières »« elle proposera l'instauration d'un socle de protection sociale universel » et un « sommet social » sera organisé à la veille du sommet du G20. Sans dire lesquels, le président a promis des résultats...

Installé à la présidence du G20 depuis moins de trois mois, Nicolas Sarkozy a très peu goûté la question d’une journaliste qui l’interrogeait sur la fonction d’un G20 face à la montée en puissance d’un G2 sino-américain : « Le G2 sino-américain n'existe pas, nous sommes dans un monde multilatéral », a-t-il dit.

Sarkozy, opération re-présidentialisation

D’un ton grave, Nicolas Sarkozy s’est évidemment longuement attardé sur la révolution en Tunisie. Il a admis que Paris n'avait «pas pris la juste mesure de la désespérance d'un peuple frère». «Quand on est si proche, quand les destinées individuelles et collectives sont tellement imbriquées, on n'a pas toujours le recul nécessaire», a-t-il expliqué.

Il a également défendu Michèle Alliot-Marie dont l'offre de coopération policière au régime tunisien avait suscité la polémique. Nicolas Sarkozy a estimé que la ministre des Affaires étrangères avait simplement voulu «éviter qu'il y ait plus de drames». «La forme a pu porter à polémique. Je ne veux pas que la France soit assimilée à un pays qui ait gardé des réflexes coloniaux », a-t-il tout juste reconnu.
Le président ne s'est pas attardé sur les questions de fond : les aveuglements et impérities de la diplomatie française, et en quoi prêter sa police à un tyran aux abois relèverait moins d'un « réflexe colonial » que laisser un peuple reprendre son destin en main ?

Au moins Nicolas Sarkozy, a-t-il évité de sombrer dans les explications hasardeuses de sa « plume ». Le matin même, au micro de France-Inter, Henri Guaino, était interrogé sur les ratés du discours officiel de la France lors de la révolution tunisienne. Pour seule échappatoire, le conseil spécial du Président a expliqué que «ce n'est pas la première fois qu'on tire à balles réelles sur les émeutiers. Même dans les pays démocratiques, cela peut arriver » faisant allusion aux émeutes de Los Angeles de 1992 qui ont fait entre 50 et 60 victimes. 

Ce n’est qu’en toute fin de conférence de presse que l’atmosphère s’est quelque peu détendue lors de l’intervention d’une journaliste étrangère curieuse de savoir si en cas de contagion de la révolution en Algérie, le pays refuserait d'accueillir le président Bouteflika comme elle a interdit au président Ben Ali de s'exiler en France ?

Esquissant un sourire mais mal à l’aise, en homme sage, prudent et en phase de « re-présidentialisation », Sarkozy a esquivé la question: « En visite officielle ? », a-t-il demandé, trop soucieux, cette fois, de ne pas insulter l’avenir.

Et si l’on réquisitionnait l’empire immobilier de Ben Ali à Paris ?

Jack Dion s'interroge sur l'attitude de la France à l'égard du clan Ben Ali, et plus généralement de certains dictateurs. Après s'être aveuglée sur le régime tunisien, accueilli l'exil pendant 25 ans de Jean-Claude Duvalier, va-t-elle fermer les yeux sur le confortable patrimoine accumulé par Ben Ali, alors qu'elle pourrait le réquisitionner ?

On peut comprendre que les Tunisiens aient quelque difficulté à saisir les virages successifs de la diplomatie française à l’égard de leur révolution. Lors de sa conférence de presse, au prix de contorsions verbales qui témoignent de son embarras, Nicolas Sarkozy s’est livré à un exercice périlleux en invoquant la « non ingérence », nouvelle vertu cardinale de la France.

Dans ce cas, il faut rapatrier au plus vite nos soldats d’Afghanistan, quitter la structure de commandement de l’Otan, qui est le modèle par excellence de la machine à s’ingérer, et ne pas chercher des poux dans la tête de Hu Jintao, le président chinois, à propos du Tibet. Passons. Tout cela n’est pas sérieux, et le prestige de la France dans le monde ne sortira pas grandi de cet épisode funeste.

Il y aurait un moyen symbolique de limiter les dégâts. Il suffirait de réquisitionner les biens de la famille Ben Ali en France, et de les mettre sous séquestre avant de les restituer aux futures autorités tunisiennes, qui pourront ensuite en faire ce qu’elles voudront.

Libération a détaillé trois beaux morceaux du patrimoine de l’ancien président. Il y a un hôtel particulier situé 17 rue Le Sueur (XVIème arrondissement), et qui appartient à Nesrine, la quatrième fille de la célèbre famille. Il faut y ajouter un somptueux appartement 16 place des Etats-Unis (XVIème arrondissement), propriété des frères Mabrouk, tous liés au clan Ben Ali. Enfin, au 18 avenue Elisée-Reclus (VIIème) se trouve l’appartement des Taïbi, présentés comme un « sous clan » de celui qui est à la Tunisie ce que Ceaucescu fut à la Roumanie.

Voici peu, le porte-parole du gouvernement, François Baroin, avait affirmé que la France se tenait « à la disposition des autorités constitutionnelles tunisiennes » pour examiner le sort des biens immobiliers du président tunisien déchu. Il serait bien de ne pas en rester au stade des paroles verbales et de passer aux actes. Le droit de réquisition existe. Pourquoi ne pas l’appliquer dans ce cas précis, et au plus vite ?

Evoquant la révolte qui a balayé la Tunisie, lors de sa conférence de presse, Nicolas Sarkozy a eu cette phrase : « Nous n’avions pas pris la mesure ». Voilà un très bon moyen de la prendre.

Le message serait d’autant plus pertinent que la France a souvent su se montrer fort compréhensive avec certains dictateurs. Le dernier exemple en date est celui de Jean-Claude Duvalier, alias Baby Doc, qui est rentré en Haïti après avoir passé 25 ans en France, sans jamais avoir été inquiété par la justice. 

Baby Doc avait atterri à Grenoble le 7 février 1986. La gauche et la droite l’ont laissé vaquer à ses occupations en toute tranquillité. L’ex dictateur a écumé les grandes villes de France et de Navarre, en se livrant à des frasques bien vite oubliées grâce à un carnet d’adresse aussi fourni que ses comptes en banque. Le clan Ben Ali va-t-il bénéficier des mêmes complicités ?

Certes, Zine El Abidine Ben Ali n’est pas en France. Pour l’heure, il est réfugié en Arabie Saoudite. On s’étonne cependant qu’aucune voix ne s’élève pour s’étonner que les autorités d’un pays ami des Etats-Unis le laissent libre de ses mouvements, comme s’il était en villégiature.

Serait-il incongru d’exiger l’arrestation de l’ancien dictateur tunisien afin qu’il puisse rendre des comptes à la justice de son pays ? Va-t-on laisser tous les membres de cette (grande) famille s'éparpiller aux quatre coins du monde, à l’image de l’un des frères de l’épouse de Ben Ali, qui vient de débarquer avec les siens à Montréal, où il possède une villa cossue dans le quartier huppé de Westmount, achetée il y a deux ans ?

En ce moment, parmi les manifestants qui défilent à Tunis devant le palais du Premier ministre, on entend ce cri : « La Kasbah, c’est la Bastille de la Tunisie, et on va la démonter, comme les sans-culottes ont fait tomber la Bastille en 1789 ». Montrons leur que la France de 2011 n’est pas totalement indigne de celle de 1789.